Dermatofibrosarcome de Darier-Ferrand

Le dermatofibrosarcome est un cancer rare de cause inconnue, souvent localisé sur le torse, il se manifeste sous forme d'une tache surélevée ou de bouton(s) de couleur chair. Si le dermatofibrosarcome ne donne pas de lésions à distances, il peut récidiver en cas d'ablation incomplète. Le traitement repose sur une opération chirurgicale.

Auteur : Dr Philippe Abimelec
Mise à jour scientifique : mai 2022

Résumé sur le dermatofibrosarcome

Le dermatofibrosarcome est un cancer de la peau qui survient habituellement entre 20 et 50 ans, plus souvent sur le torse ou la racine des membres- c’est un cancer rare dont la cause est inconnue. Son aspect est celui d’une plaque mal limitée, parfois surélevée de lésions en relief, de couleur chair ou rouge. Le dermatofibrosarcome est indolore, il augmente lentement et progressivement de taille sans provoquer de gêne. Le dermatofibrosarcome ne donne qu’exceptionnellement des lésions à distances (métastases). Le dermatologue fait le diagnostic de cette affection par un prélèvement de la peau (biopsie) qui sera ensuite examiné au microscope (histologie). Le traitement repose en première intention sur une opération chirurgicale qui consiste en une ablation de la lésion avec une marge de sécurité afin d’éviter les récidives locales.

Synonymes du dermatofibrosarcome

dermatofibrosarcome de Darier-Ferrand. En anglais : Dermatofibrosarcoma protuberans, DFSP

Qu’est ce qu’un dermatofibrosarcome ?

Le dermatofibrosarcome également connu sous le nom de dermatofibrosarcome de Darier-Ferrand est un cancer de la peau très rare. Il apparaît chez des adultes entre 20 et 50 ans, mais peut survenir à n’importe quel âge. Plus fréquent chez l’homme, il peut apparaître sur les peaux blanches ou colorées. Le dermatofibrosarcome est rare chez les enfants.

Le dermatofibrosarcome survient généralement sur le torse, le dos et les épaules. Il peut se voir sur les membres inférieurs, plus rarement au niveau de la tête et du cou.

Le dermatofibrosarcome prend naissance à partir des couches moyennes et profondes de la peau, il peut ensuite s’étendre et envahir la graisse et le muscle sous-jacent. Le dermatofibrosarcome a une croissance lente mais peut se disséminer tissus avoisinants. Cette tumeur ne s’étend pas en dehors de la peau (elle ne donne pas de métastases), mais le dermatofibrosarcome peut récidiver après l’opération chirurgicale, si celle-ci n’a pas été assez large. Le traitement de référence repose sur l’ablation large avec des marges de sécurité.

Quelle est la cause du dermatofibrosarcome ?

La cause du dermatofibrosarcome est inconnue. Un traumatisme de la zone atteinte peut être un facteur déclenchant. Des données scientifiques récentes montrent des anomalies des chromosomes dans les cellules du dermatofibrosarcome, celles ci pourraient être responsables d’une multiplication incontrôlée. Le dermatofibrosarcome n’est pas une maladie héréditaire.

Quel est l’aspect du dermatofibrosarcome ?

Le dermatofibrosarcome n’a pas d’aspect très distinctif, au début, c’est un simple épaississement de la peau (une plaque) ou une petite boule (nodule). Il est indolore, de consistance ferme, et augmente de taille de façon lente (sur des mois ou des années). La taille dépend du stade du diagnostic. Le dermatofibrosarcome peut avoir la couleur de la peau normale ou une couleur rouge/brune (selon la couleur de la peau). Rarement il peut avoir une couleur bleuâtre. Dans les cas ayant évolué sans traitement, le dermatofibrosarcome peut entrainer une plaie ou une ulcération.

Quels sont les symptômes du dermatofibrosarcome ?

Les patients atteints remarquent surtout l’apparition d’un épaississement cutané ou d’un bouton palpable qui augmente lentement de taille, ou change de couleur, ce qui les pousse à consulter un dermatologue. Le dermatofibrosarcome est indolore et ne provoque pas de gêne.

Comment le dermatologue fait-il le diagnostic d’un dermatofibrosarcome ?

Au stade de début, le dermatofibrosarcome est souvent confondu avec d’autres maladies car il s’agit d’une affection rare, son diagnostic est donc fréquemment retardé. En cas de suspicion de dermatofibrosarcome, une biopsie cutanée doit être réalisée. Le dermatologue prélève un fragment de la lésion suspecte sous anesthésie locale et celui-ci est envoyé au laboratoire pour examen sous microscope. L’analyse microscopique du médecin spécialisé en anatomapathologie permet en général le diagnostic de dermatofibrosarcome.

Avec quelles autres maladies peut-on confondre un dermatofibrosarcome ?

Le dermatofibrosarcome peut être confondu avec d’autres excroissances de la peau :
– Un fibrome de la peau (dermatofibrome) ou histiocytofibrome : c’est un bouton de couleur brune qui survient sur les membres.
– Un kyste épidermique : c’est une petite « boule » sous la peau, recouverte d’une peau de couleur normale.
– Une cicatrice anormale (cicatrice chéloïde ou hypertrophique ) : c’est une excroissance de chair qui survient chez des patients prédisposés, particulièrement sur les peaux noires. Les cicatrices anormales se développent sur une cicatrice de chirurgie ou à l’endroit d’une blessure (orifice de la boucle d’oreille).
– Autres cancers de la peau : Le mélanome, le carcinome épidermoïde et le carcinome baso-cellulaire peuvent éventuellement poser un problème de diagnostic. Il est important de réaliser un prélèvement (biopsie) pour examen au microscope de tout bouton suspect, surtout s’il augmente de volume.

Est ce que le dermatofibrosarcome peut être guéri ?

Le dermatofibrosarcome de Darier Ferrand est un sarcome de bas grade dont le caractère cancéreux est surtout local – il ne dissémine pas à distance, mais infiltre et se propage dans les tissus avoisinants.
Le dermatofibrosarcome peut être guéri s’il est enlevé entièrement par chirurgie, le risque de récidive est cependant assez important surtout si le geste est trop limité. Le risque élevé de récidive locale impose une opération par des équipes qui ont l’habitude de cette affection et mettent en oeuvre des techniques chirurgicales spécifiques – chirurgie de Mohs, technique verticale modifiée. Un suivi régulier par un dermatologue expérimenté est impératif après le traitement.

Quels sont les traitements du dermatofibrosarcome ?

Le dermatofibrosarcome doit être traité par des équipes multidisciplinaires (dermatologue, chirurgien, radiothérapeute, cancérologue) en centre spécialisé (oncodermatologie). Les décisions de traitement sont toujours prises en groupe lors d’une réunion de concertation multidisciplinaire.

Chirurgie

L’excision chirurgicale est le traitement le plus efficace pour le dermatofibrosarcome. La chirurgie doit impérativement enlever l’intégralité de lésion avec des marges afin de ne pas laisser en place de cellule cancéreuse, car il existe un risque de récidive et d’invasion des tissus avoisinants.

Il existe essentiellement deux types de procédures chirurgicales qui peuvent être envisagées :

– Une ablation large : Cela implique une excision chirurgicale de la lésion avec une marge de peau saine de plusieurs centimètres autour des limites apparentes, ceci pour minimiser le risque de laisser des cellules cancéreuses. Après exérèse, la plaie est réparée par des points suture, plastie ou greffe de peau. L’opération est réalisée sous anesthésie locale ou générale, en fonction de la taille et de la localisation du dermatofibrosarcome.

Analyse Microscopique au laboratoire

La chirurgie avec analyse exhaustive des marges ou technique verticale modifiée (technique verticale modifiée dite de Breuningen) : L’analyse histologique de l’ensemble des marges permet de s’assurer de l’absence de cellule résiduelle. C’est une technique d’analyse microscopique par coupes sériées pratiquée dans certains centres spécialisés. Elle permet une analyse rapide et plus complètes berges. L’analyse en profondeur de la pièce est cependant moins précise qu’avec la technique de Mohs.

La chirurgie de Mohs : C’est une technique chirurgicale spécialisée habituellement réalisée par un dermatologue. Elle consiste à enlever la lésion par étapes sous anesthésie locale. Le tissu enlevé est examiné au microscope (en général dans la journée ou le lendemain), tandis que la plaie est recouverte d’un pansement en attendant le résultat. Si l’examen au microscope détecte des cellules cancéreuses résiduelles, alors on recommence la procédure sur la zone concernée uniquement, jusqu’à ce que le dermatofibrosarcome soit enlevé intégralement avec des marges saines. La plaie est ensuite réparée par dermatologue ou le chirurgien plasticien en fonction de sa taille et sa localisation. L’avantage de cette technique est de diminuer le volume de tissu normal enlevé autour de la lésion.

Traitements médicaux
Dans les cas ou la chirurgie ne permet pas une ablation complète du dermatofibrosarcome ou la chirurgie est difficile, des traitements alternatifs peuvent être proposés.

La radiothérapie : La radiothérapie : elle peut être utilisée quand l’ablation chirurgicale n’est pas complète ou que celle-ci provoquerait une gêne trop grande.

Les thérapies moléculaires ciblées : La découverte des anomalies chromosomiques présentes dans la plupart des dermatofibrosarcomes de Darier Ferrand a permis le développement d’une thérapie ciblée telle que L’imatinib (Gleevec®, Glivec®). L’imatinib est depuis quelques années indiqué en cas de dermatofibrosarcome récidivant ou inopérable avec des réponses cliniques objectives fréquentes en cas de présence de l’anomalie chromosomique. L’imatinib a d’ailleurs récemment été proposé en traitement préopératoire (thérapie néoadjuvante), dans certains cas de dermatofibrosarcome évolués ou récidivants, afin de rendre opérable certaines lésions, et de diminuer les marges.

D’autres thérapies ciblées sont actuellement en cours d’étude, en particulier à l’hôpital Saint-Louis (Paris). Grace aux travaux de recherches du Pr Céleste LEBBE, le service d’oncodermatologie de l’hôpital Saint-Louis est la la pointe du traitement du dermatofibrosarcome. Un essai clinique est proposé aux patients dont l’opération provoquerai une gêne trop grande ou en cas de récidive. Hôpital Saint-Louis – service d’oncodermatologie Pr Céleste LEBBE Essai clinique de phase II sur le Pazopanib

Quel est le pronostic d’une personne atteinte d’un dermatofibrosarcome ?

Le dermatofibrosarcome est une tumeur maligne qui provoque exceptionnellement des métastases (c’est à dire une dissémination à distance, en dehors de la peau).

Le risque majeur est celui d’une récidive après traitement, il peut aller jusqu’à 10 à 20% selon la qualité du traitement fait initialement, elle survient habituellement dans les 3 premières années. Un suivi régulier par un spécialiste est donc crucial.

Quelles sont les précautions à prendre ?

Le dermatofibrosarcome est difficile à reconnaître, même par de dermatologue. Il faut consulter un dermatologue en cas de changement d’aspect d’une cicatrice ou en cas de bouton suspect, surtout s’il augmente progressivement de volume.

Pour plus d’informations

Emedicine – dermatofibrosarcoma protuberans (DFSP)
http://emedicine.medscape.com/

British association of dermatologists – dermatofibrosarcoma protuberans (DFSP)
http://www.bad.org.uk/

New Zealand society of dermatology – dermatofibrosarcoma protuberans (DFSP)
http://www.dermnetnz.org/

Essais cliniques en cours

Clinicaltrials.gov – dermatofibrosarcomaprotuberans
http://clinicaltrials.gov

Hôpital Saint-Louis – service d’oncodermatologie Pr Céleste LEBBE
Essai clinique de phase II sur le Pazopanib

Photographies

Aspect typique de dermatofibrosarcome
Aspect typique de dermatofibrosarcome : plaque formée de nodules rougeâtres au niveau de l’épaule
Chih-Shan Jason Chen, MD; Chief Editor: Dirk M Elston, MD. Dermatofibrosarcoma Protuberans. Medscape
Aspect typique de dermatofibrosarcome
Aspect typique de dermatofibrosarcome : plaque formée de nodules rougeâtres
Sanjay Bhambri, DO; Chief Resident, Dermatology, Valley Hospital Medical Center, Las Vegas, Nevada. Dermatofibrosarcoma Protuberans : A Case Report and Review of the Literature. JCAD Online Editor | May 9, 2008.
Dermatofibrosarcoma Protuberans

Remerciements

Nous remercions le Pr Céleste Lebbe (Hôpital Saint-Louis) et le Dr Delphine Kérob (Hôpital Saint-Louis et Galderma), pour leur relecture et leurs corrections.

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